Négociation collective et plan d’action

Obligation de négocier sur l’égalité professionnelle

Entreprises concernées

 

Parmi les deux blocs des négociations obligatoires en entreprise figure l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, portant notamment sur les mesures visant à supprimer les écarts de rémunération, et la qualité de vie au travail

(c. trav. art. L. 2242-1). Sur la périodicité de cette négociation, voir § 3-4.

Seules les entreprises dotées d’un délégué syndical (c. trav. art. L. 2143-3 et L. 2143-6) ou d’un conseil d’entreprise (c. trav. art. L. 2321-1) doivent négocier un accord d’entreprise sur l’égalité professionnelle ou à défaut, mettre en place un plan d'action  [c. trav. art. L. 2242-1 .

Le fait que la branche ait conclu un accord relatif à l’égalité professionnelle ne dispense pas les entreprises de la branche considérée de se doter de leur propre accord ou de leur propre plan d’action annuel (instr. DGT/DPSIT/RT3 2017-124 du 4 avril 2017).

Depuis le 1er mars 2020, les entreprises de 50 salariés et plus doivent calculer et publier un index égalité professionnelle entre les femmes et les hommes composé de 4 à 5 critères et d’une note sur 100. Si cette note est inférieure à 75, la négociation sur l’égalité professionnelle doit alors porter sur « les mesures adéquates et pertinentes de correction et, le cas échéant, sur la programmation, annuelle ou pluriannuelle, de mesures financières de rattrapage salarial » (c. trav. art. L. 2242-1, 2° et L. 1142-9).

Thèmes de négociation en présence d'un accord de méthode

Un accord collectif de méthode peut aménager la négociation sur l'égalité (c. trav. art. L. 2242-10 à L. 2242-11 

L’accord de méthode précise (c. trav. art. L. 2242-1 et L. 2242-11) :

-les thèmes de négociations dont les mesures visant à supprimer les écarts de rémunération entre les femmes et les hommes et la qualité de vie au travail ;

-le contenu de chacun des thèmes ;

-le calendrier et les lieux des réunions ;

-les informations que l'employeur remet aux négociateurs sur les thèmes prévus par la négociation qui s'engage et la date de cette remise ;

-les modalités selon lesquelles sont suivis les engagements souscrits par les parties.

La délégation de chaque syndicat représentatif comprend obligatoirement :

  • son délégué syndical lorsqu’il n’en a désigné qu’un, et au moins deux délégués syndicaux librement choisis lorsqu’il en a plusieurs. Du seul fait de leur désignation, les délégués syndicaux sont investis de plein droit du pouvoir de négocier et conclure un accord d’entreprise sans avoir pour cela à présenter une délibération ou un mandat spécial (Cass. soc., 19 févr. 1992, no 90-10.896) ;
  • chaque syndicat peut, s’il le souhaite, compléter sa délégation par des salariés de l’entreprise (représentants du personnel ou non) dont le nombre est fixé par accord entre l’employeur et l’ensemble des syndicats représentatifs parties aux négociations. A défaut d’accord, ce nombre est au plus égal, par délégation, à celui des délégués syndicaux de la délégation. Toutefois, dans les entreprises n’ayant qu’un seul délégué syndical, ce nombre peut être porté à deux (C. trav., art. L. 2232-17).

Thèmes de négociation en l'absence d'un accord de méthode

En l’absence d’accord de méthode, la négociation sur l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et la qualité de vie au travail porte sur (c. trav. art. L. 2242-17) :

-l'articulation entre la vie personnelle et la vie professionnelle pour les salariés ;

-les objectifs et les mesures permettant d'atteindre l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, notamment en matière de suppression des écarts de rémunération, d'accès à l'emploi, de formation professionnelle, de déroulement de carrière et de promotion professionnelle, de conditions de travail et d'emploi, en particulier pour les salariés à temps partiel, et de mixité des emplois ;

-les mesures permettant de lutter contre toute discrimination en matière de recrutement, d'emploi et d'accès à la formation professionnelle ;

-les mesures relatives à l'insertion professionnelle et au maintien dans l'emploi des travailleurs handicapés, notamment les conditions d'accès à l'emploi, à la formation et à la promotion professionnelles, les conditions de travail et d'emploi et les actions de sensibilisation de l'ensemble du personnel au handicap ;

-les modalités de définition d'un régime de prévoyance et, dans des conditions au moins aussi favorables que celles prévues à l'article L. 911-7 du code de la sécurité sociale, d'un régime de remboursements complémentaires de frais occasionnés par une maladie, une maternité ou un accident, à défaut de couverture par un accord de branche ou un accord d'entreprise.

-l'exercice du droit d'expression directe et collective des salariés, notamment au moyen des outils numériques disponibles dans l'entreprise ;

-les modalités du plein exercice par le salarié de son droit à la déconnexion et la mise en place par l'entreprise de dispositifs de régulation de l'utilisation des outils numériques, en vue d'assurer le respect des temps de repos et de congé ainsi que de la vie personnelle et familiale. À défaut d'accord, l'employeur

élabore une charte, après avis du comité social et économique [voir Dictionnaire Social « Droit à la déconnexion »].

Périodicité

L'obligation de négocier est annuelle, tant qu'un accord collectif sur l'égalité femmes-hommes n'est pas conclu (c. trav. art. L. 2242-13).

Un accord de méthode (voir § 3-2) peut cependant changer la périodicité de l'obligation de négocier et la porter jusqu'à un maximum de 4 ans (c. trav. L. 2242-11 , 1° et L. 2242-12).

 Dans ce cas, en cas d'échec des négociations sur l'égalité, l'employeur sera tenu de négocier de nouveau mais seulement à l’issue du délai fixé par l'accord de méthode et non chaque année.

Informations à transmettre

La négociation sur l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes s’appuie sur les éléments d’informations définis par l’accord de méthode conclu le cas échéant (voir § 3-2).

À défaut d’accord de méthode, cette négociation s’appuie sur les informations et les indicateurs chiffrés de la situation comparée femmes/hommes figurant dans la base de données économiques, sociales et environnementales (BDESE) (c. trav. art. L. 2312-36 2°, R. 2312-8 et R. 2312-9).

 

 

Rappelons que la base de données économiques, sociales et environnementales (BDESE) n'est obligatoire que dans le cadre des attributions du CSE des entreprises d'au moins 50 salariés. Elle rassemble l'ensemble des informations nécessaires aux consultations et informations récurrentes que l'employeur met à disposition du comité social et économique (c. trav. art. L. 2312-18 et L. 2312-36).

Consultation du CSE sur la politique sociale

Sauf accord collectif prévoyant une autre périodicité ou un autre contenu, la consultation annuelle sur la politique sociale de l'entreprise, les conditions de travail et l'emploi porte notamment sur l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes c. trav. art. L. 2312-26 .

Dans ce cadre, l'employeur met à la disposition du CSE, un diagnostic sur 9 domaines d’actions pour chacune des catégories professionnelles au sein de l'entreprise (c. trav. art. L. 2312-26 et R. 2242-2), qui sont :

-l'embauche ;

-la formation ;

-la promotion professionnelle ;

-la qualification ;

-la classification ;

-les conditions de travail ;

-la sécurité et la santé au travail ;

-la rémunération effective ;

-l'articulation entre l’activité professionnelle et la vie personnelle et familiale.

À la suite du diagnostic lié à la consultation annuelle sur la politique sociale de l'entreprise, il est recommandé à l’employeur d'élaborer une stratégie d’action pour promouvoir et garantir l'égalité.

La négociation d'un accord fait partie de cette stratégie (Guide pratique sur l’égalité professionnelle du ministère du Travail du 8 mars 2021, actualisé le 12 mars 2021, www.travail-emploi.gouv.fr).

Exemples de clauses d'accord collectif sur l'égalité professionnelle

Domaine d’action

Objectif

Actions et indicateurs de suivi

Rémunération

Réduction des écarts

Analyser les éléments de rémunération (suivi de la répartition par genre des augmentations individuelles, primes et avantages) et prévoir un budget pour corriger les écarts constatés

Embauches

Augmenter les candidatures du sexe sous représenté

Diversifier les modes de diffusion des offres d’emploi (suivi du nombre de média de diffusion et du pourcentage d’hommes dans les candidats sélectionnés en proportion des candidatures reçues)

Conditions de travail

Réduire les différences d’accès au temps partiel

Développer les aménagements horaires à la demande et informer les salariés (suivi par genre du nombre de temps plein et temps partiel)

Promotion

Développer un accès égal

Former les managers pour identifier les salariées à « fort potentiel » (suivi par genre du nombre de promotions et de la durée moyenne entre deux promotions)

Formation

Rééquilibrer l’égal accès à la formation du sexe sous-représenté

Rendre prioritaire l’accès à la formation du sexe sous-représenté y recourant le moins, en développant, par exemple, les formations à distance et à proximité du domicile ou des aides à la garde d'enfants (suivi par genre des participants aux formations)

Qualification

Réduire les différences d’accès aux niveaux de qualifications supérieures

Rendre prioritaire l’accès aux formations qualifiantes du sexe sous-représenté (suivi par genre du nombre d'actions programmées et du nombre de qualifications obtenues)

 

 

Accord collectif majoritaire

La négociation se déroule avec tous les syndicats représentatifs, catégoriels comme intercatégoriels qui doivent avoir été invités à participer (cass. soc. 26 mars 2002, n° 00-17231, BC V n° 107).

Un accord majoritaire étant exigé, les syndicats signataires doivent totaliser plus de 50 % des suffrages exprimés en faveur des syndicats représentatifs au premier tour des dernières élections des membres du comité social et économique (CSE) (c. trav. art. L. 2232-12). Dans le cas où les syndicats signataires ne représentent pas plus de 50 %, l’accord peut s’appliquer s'ils représentent plus de 30 % des suffrages exprimés au premier tour en faveur des syndicats représentatifs, et que l'employeur fait valider l'accord par référendum auprès du personnel [c. trav. art. L. 2232-12.

Plan d'action

Entreprises visées

À défaut d'accord (et sous réserve dans les entreprises d'au moins 300 salariés d'avoir établi et déposé un procès-verbal de désaccord) (c. trav. art. L. 2242-5 et L. 2242-8), l’employeur des entreprises de 50 salariés et plus établit un plan d’action annuel. Ce plan d’action peut reprendre les points d’accord de la négociation et détermine pour chacun d'eux des objectifs de progression, ainsi que les actions qualitatives et quantitatives pour les atteindre et les coûts associés (c. trav. art. L. 2242-3).