Modification des horaires de travail du salarié
1. Précisions préliminaires
Avant de commencer à expliquer le régime de la modification des horaires de travail il convient de distinguer horaires de travail et temps de travail. Les horaires de travail font référence à la répartition du temps de travail sur une journée qui se distingue de la durée du temps de travail. Le temps de travail fera l’objet d’une newsletter dans les prochains mois.
2. Le régime du changement des horaires de travail pour les salariés à temps plein
2.1. Principe
Pour les salariés à temps plein, le régime est le suivant : sauf atteinte excessive au droit du salarié au respect de sa vie personnelle et familiale ou son droit à repos un changement des horaires de travail (répartition du temps de travail sur une journée) constitue un simple changement des conditions de travail et non une modification du temps de travail (Cass. soc., 3 nov. 2011, n° 10-14.702, n° 2208 FS - P + B).
Ainsi, le refus du salarié peut entraîner un licenciement pour faute. Par exemple: un salarié qui travaillait de 8h à 16h et qui maintenant doit travailler de 9h à 17h se voit imposer un simple changement des conditions de travail et ne peut refuser sans s’exposer à un licenciement pour faute.
De même, En l'absence d'une quelconque répercussion de la modification de la cadence de travail sur la rémunération ou le temps de travail des salariés, la modification de la cadence de travail constitue un simple changement des conditions de travail. Tel est le cas lorsque l'employeur notifie à ses salariées, femmes de ménage, qu'elles disposeront désormais de 45 minutes au lieu d'une heure par cage d'escalier. (Cass. soc., 20 oct. 2010, n° 08-44.594, n° 1985 FS - P + B)
2.2. Exceptions
Première exception, si les horaires de travail sont contractualisés, le changement d'horaires a été analysé comme constituant un cas de modification du contrat de travail (bouleversement de l'économie du contrat) (Cass. soc., 11 juill. 2001, n° 99-42.710, n° 3533 F - P : Bull. civ. V, n° 264). Tel est le cas, lorsque les horaires quotidiens, à défaut de clause expresse dans le contrat, ont fait l'objet d'un commun accord entre les parties. Une permutation du matin à l'après-midi de ces horaires constitue une modification du contrat de travail. Le refus de cette modification des horaires par le salarié n'est pas un motif légitime de licenciement (Cass. soc., 3 nov. 2010, n° 09-41.132).
Deuxième exception, la jurisprudence pose une limite au pouvoir de l’employeur en lorsque le changement d'horaire de travail implique un bouleversement très important des conditions de travail. Il constitue alors une modification du contrat. C’est par exemple le cas dans les situations suivantes :
• Constitue une modification du contrat de travail que le salarié est en droit de refuser le passage d'un horaire fixe à un horaire variable (Soc. 31 oct. 2000).
• Le passage d'un horaire de jour à un horaire de nuit caractérise une modification du contrat de travail que le salarié est en droit de refuser. (Soc. 22 mai 2001, no 99-41.146).
• Il en est de même s'agissant du passage d'un horaire de nuit à un horaire de jour, et ce, peu importe, la clause de variabilité des horaires prévue par le contrat de travail. (Soc. 18 déc. 2001, no 98-46.160 )
• Le passage d'un horaire continu à un horaire discontinu constitue une modification du contrat de travail que le salarié est en droit de refuser ● (Soc. 3 nov. 2011)
• Enfin, constitue une modification du contrat de travail nécessitant l'accord du salarié le changement de la répartition des horaires ayant pour effet de priver le salarié de repos dominical. (Soc. 2 mars 2011)
Troisième exception, l'instauration d'une nouvelle répartition des horaires sur la journée nécessite l'accord du salarié s'il porte une atteinte excessive au droit du salarié au respect de sa vie personnelle et familiale ou à son droit au repos. (Cass. soc., 3 nov. 2011, n° 10-14.702, n° 2208 FS - P + B Cass. soc., 29 mai 2024, n° 22-21.814, n° 532 F - B), par exemple :
• L'employeur décide de faire travailler la salariée le mercredi au lieu du samedi alors qu'il savait, en tant que beau-frère de celle-ci, que ce changement d'horaires portait une atteinte excessive au droit au respect de sa vie personnelle et familiale de l'intéressée (Cass. soc., 8 nov. 2011, n° 10-19.339) • l'employeur décide, à l'égard d'un agent de sécurité qui travaillait de nuit, de le faire travailler de jour alors que le salarié justifiait ce refus de changer d'horaire par le fait que sa présence diurne auprès de son enfant handicapé était nécessaire. Pour preuve, il avait produit la notification du versement de l'allocation d'éducation spécialisée pour sa fille âgée de sept ans et handicapée à 80 % pour laquelle la MDPH avait reconnu la prise en charge par les parents d'au moins 20 % des activités de l'enfant par une adaptation des horaires de travail. (Cass. soc., 29 mai 2024, n° 22-21.814, n° 532 F - B)
Quatrième exception: Le salarié peut refuser un changement de ses horaires si ce changement fait obstacle à l'exercice de son mandat électif régi par l'article L. 2123-1 du code général des collectivités territoriales. Il s'agit d'un motif légitime de refus.
Cinquième exception enfin, l’intention de nuire. Commet un abus de droit, l'employeur dont la décision de changer les horaires du salarié avait été prise dans le but de nuire au salarié. En effet, l'employeur demandait au salarié de prendre son jour de repos un mercredi sur deux au lieu de tous les mercredis alors que le salarié, étant divorcé, avait la garde de ses enfants et souhaitait préserver son jour de repos chaque mercredi. (Cass. soc., 12 mars 2002, n° 99-46.034) Pour toutes ces exceptions, le salarié doit donner son accord et ne peut être sanctionné par l’employeur s’il refuse.
3. Le régime du changement des horaires de travail pour les salariés à temps partiel
3.1. Principe
Pour les salariés à temps partiel, la répartition du temps de travail constitue un élément du contrat de travail qui ne peut être modifié sans l'accord de l'intéressé. (Soc. 7 juill. 1998, no 95-43.443 ). Ainsi, un salarié à temps partiel ne peut se voir imposer un changement de ces horaires de travail.
Une clause du contrat de travail d’un salarié à temps partiel peut permettre à l’employeur d’imposer ce changement des conditions de travail à 2 conditions: d'une part, de la détermination par le contrat de la variation possible, d'autre part, de l'énonciation des cas dans lesquels cette modification peut intervenir. (Soc. 7 déc. 1999, no 97-42.333).
Même lorsque de telles clauses existent, le refus du salarié d'accepter ce changement ne constitue pas une faute ou un motif de licenciement dès lors que ce changement n'est pas compatible avec des obligations familiales impérieuses, avec le suivi d'un enseignement scolaire ou supérieur, avec une période d'activité fixée chez un autre employeur ou avec une activité professionnelle non salariée. (C. trav., art. L. 3123-12).applicables aux mobilités géographiques !
Cédric HUILLET Conseil en relations et stratégies sociales Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.