Réserver des départs volontaires aux salariés d’un seul établissement peut être jugé discriminatoire

Une entreprise ne peut pas, sauf raisons objectives et pertinentes, réserver le bénéfice de mesures incitant au départ volontaire aux salariés d’un seul de ses établissements.

C’est ce que vient de juger la Cour de cassation dans un arrêt important du 12 juillet 2010. Elle considère plus précisément, que « si un Plan de Sauvegarde de l’Emploi peut contenir des mesures réservées à certains salariés, c’est à la condition que tous les salariés de l’entreprise placés dans une situation identique au regard de l’avantage en cause puissent bénéficier de cet avantage, à moins qu’une différence de traitement soit justifiée par des raisons objectives et pertinentes, et que les règles déterminant les conditions d’attribution de cet avantage soient préalablement définies et contrôlables ».


En l’espèce, la société qui procédait au PSE, avait réservé des mesures incitant aux départs volontaires aux salariés d’un seul de ses 4 établissements, celui de Genlis. L’employeur estimait qu’il n’y avait pas de différence de traitement injustifiée dans la mesure où les suppressions de postes ne concernaient que les salariés de cet établissement.

Cela étant, les organisations syndicales qui avaient saisi le juge faisaient observer que si les départs volontaires ne permettaient pas d’atteindre l’objectif de réduction des effectifs, il était alors prévu des licenciements économiques « auxquels tous les salariés de l’entreprise appartenant aux catégories professionnelles concernées seraient exposées sans avoir pu bénéficier de l’alternative offerte par les aides aux départs volontaires ».

Il y avait donc bien potentiellement « une rupture dans l’égalité de traitement entre les salariés des divers établissements » qui n’était pas, par ailleurs, motivée par des raisons objectives, pertinentes et contrôlables légitimant une telle différence de traitement entre salariés placés dans une situation identique.

Cass. soc. 12 juillet 2010, n° 09-15182

 

Les départs volontaires dans le cadre d’un PSE ne sont pas des ruptures amiable

Contrairement à une idée répandue, les départs volontaires prévus dans le cadre d’un PSE s’analysent en des licenciements économiques.

La rupture du contrat de travail d’un salarié qui résulte de son départ volontaire effectué dans le cadre d’un Plan de Sauvegarde de l’Emploi mis en œuvre après consultation du comité d’entreprise, constitue un licenciement pour motif économique avec toutes les conséquences de droits corrélatives.

Ainsi, l’employeur doit préciser dans la lettre de licenciement les motifs de celui-ci. De son côté, le salarié a le droit de contester le caractère réel et sérieux de ce motif économique énoncé par l’employeur, et peut éventuellement considérer comme insuffisantes les recherches de reclassement auxquelles doit procéder l’employeur. Plus généralement, toutes les obligations relatives aux licenciements économiques doivent être respectées.

 

 

Cass. soc. 13 juillet 2010, n° 09-42836 et n° 09-42838


Renouvellement de la période d’essai 

Le renouvellement de la période d’essai doit nécessairement faire l’objet d’un accord exprès du salarié.

Le renouvellement de la période d’essai ne peut résulter que d’un accord exprès des parties intervenues au cours de la période initiale, même si les dispositions conventionnelles prévoient une simple information du salarié.

En l’espèce, l’article 4-2-3 de la convention collective applicable, celle des télécommunications, prévoyait que « le renouvellement éventuel de la période d’essai doit être notifié au salarié par écrit au plus tard avant le terme de la période initiale à l’initiative de l’une ou l’autre des parties ». Le contrat de travail du salarié stipulait, par ailleurs, que la période d’essai initiale de 3 mois pourrait être renouvelée une fois par l’employeur.

Pour autant, le juge a considéré que le renouvellement de la période d’essai ne pouvait pas intervenir par décision unilatérale l’employeur.

Cass. soc. 12 juillet 2010, n° 09-41875

 

L’ordre du jour du CE doit être établi conjointement par le secrétaire et le président du CE : rappel de la règle

  L’employeur qui entend faire inscrire une question à l’ordre du jour de la réunion du comité d’entreprise, doit, dans tous les cas, la soumettre préalablement au secrétaire du CE.

Il en est ainsi même si la question fait l’objet d’une consultation obligatoire. Cette règle énoncée par la Cour de cassation dans un arrêt du 12 juillet 2010 peut surprendre.

En effet, depuis une loi du 18 janvier 2005, l’article L. 2325-15 du code du travail dispose que les consultations du CE rendues obligatoires par une disposition législative, réglementaire, ou par un accord collectif sont inscrites de plein droit à l’ordre du jour de la réunion par le président ou le secrétaire.

Se fondant sur cet article de loi, un employeur avait cru pouvoir se dispenser de demander au secrétaire du CE l’inscription d’un point à l’ordre du jour d’une réunion dans la mesure où celui-ci devait obligatoirement être soumis à l’avis des élus du CE.
Erreur, jugea la Cour de cassation qui considère que l’article L. 2325-15 du code du travail ne dispense pas l’employeur qui entend faire inscrire une question à l’ordre du jour de la réunion du CE de la soumettre préalablement au secrétaire du comité, alors même que la consultation de cette institution est obligatoire.

Il faut en conclure que c’est seulement dans le cas où le secrétaire refuse l’inscription à l’ordre du jour de la question, c’est-à-dire après qu’un échange ait eu lieu avec lui, que l’employeur peut alors l’inscrire de son propre chef.

Cass. soc. 12 juillet 2010, n° 08-40740

Appliquer une clause de mobilité dans le respect de la vie personnelle et familiale

La mise en œuvre d’une clause de mobilité ne doit pas porter atteinte au droit du salarié à une vie personnelle et familiale, sauf si elle est justifiée par la tâche à accomplir et proportionnée au but recherché.

En principe, une clause de mobilité permet à un employeur d’imposer à un salarié un changement de son lieu de travail. Cependant, prenant en considération les conséquences possibles de l’application d’une telle clause sur la vie personnelle et familiale des salariés, la Cour de cassation a fixé d’une part des conditions d’application restrictives (le champ d’application de la clause doit notamment être relatif à l’étendu des responsabilités des salariés) et d’autre part, des limites permettant de respecter la vie personnelle et familiale des salariés concernés.
Ainsi, les juges doivent vérifier « si la mise en œuvre de la clause contractuelle ne porte pas atteinte au droit du salarié à une vie personnelle et familiale et si une telle atteinte peut être justifiée par la tâche à accomplir et est proportionnée au but recherché ».
Dans un arrêt du 12 juillet 2010, la Cour de cassation en a ainsi jugé à propos d’un ingénieur qui avait refusé une mission de 4-5 mois à Genève, alors que son contrat de travail contenait une clause de mobilité.

Cass. soc. 12 juillet 2010, n° 08-44363

 

Démission, licenciement ou rupture conventionnelle : le choix est fait !

Depuis sa création il y a deux ans, le nombre de ruptures conventionnelles n’a jamais été aussi important que cet été.
Selon les données publiées par le ministère du Travail, 27 208 demandes d’homologation de ruptures conventionnelles ont été déposées en juin dernier et 24 194 ont été homologuées. Ce nouveau mode de rupture, créé par l’accord interprofessionnel du 11 janvier 2008, connaît ainsi un incontestable succès dont l’ampleur ne peut qu’interroger.

Quelles sont les raisons permettant d’expliquer ce développement ?

·    La première réside dans la nature même de cette rupture. Lorsque le salarié accepte de conclure une rupture de cette nature, il s’engage à ne pas saisir le juge prud’homal. Pour l’employeur, le risque judiciaire est donc ainsi conjuré.

·    Une seconde raison moins avouable et plus pernicieuse peut également être avancée. Ce mode de rupture peut aussi être utilisé en cas de rupture fondée sur un motif économique et ce, en toute légalité, comme le prévoit le 2ème alinéa de l’article L. 1233-3 du code du travail. En effet, dans cette hypothèse la rupture conventionnelle apporte un avantage financier supplémentaire à l’employeur peu soucieux de l’avenir de son ou de ses salariés dont le poste est supprimé. Celui-ci se voit en effet avec la rupture conventionnelle, libéré des obligations prévues par la loi en cas de licenciement économique, notamment de proposer au salarié un congé de reclassement ou une convention de reclassement ou encore de consulter ses représentants du personnel.

·    Troisième raison, « socialement partagée », permettre aux seniors de quitter l’entreprise et de bénéficier des allocations de l’assurance chômage, dès lors bien sûr qu’ils en remplissent les conditions.

Ces deux dernières raisons sont bien entendu critiquables et choquantes. Toutefois, ce ne sont pas les entreprises utilisant, en toute légalité, cet outil qui doivent être mises à l’index ; ce sont les concepteurs de ce mode de rupture. Les partenaires sociaux, en premier lieu, qui avaient, toutefois, pris soin de préciser que la rupture conventionnelle ne devait pas affecter les procédures de licenciement économique. Le législateur en second lieu, qui n’a pas suivi cette recommandation, et qui a modifié la loi, en sorte, de permettre la conclusion d’une rupture conventionnelle à la place d’un licenciement économique.

Mais tôt ou tard, il est fort à parier que le législateur interviendra pour limiter le champ d’application de cette forme de rupture à l’amiable.


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Gérard Fourmal

Président du syndicat national
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Jean –Marc MONDESIR

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